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Est ce que vous aimez votre corps ?

Est ce que vous aimez votre corps ?

Ecrit par Anita Covelli

En cette période estivale où les corps plus ou moins dénudés s’exposent, j’ai pensé qu’il serait plaisant de découvrir les Vecteurs au travers de leur rapport au corps. Je me suis amusée à imaginer un journaliste passant sur une plage pour poser la question : « Aimez-vous votre corps ? » Profitons de cette petite enquête imaginaire pour mieux faire connaissance avec les Vecteurs…

Dès qu’il arrive sur la plage, le journaliste repère une jolie femme entourée de 2 hommes. Elle est installée au milieu du passage menant au café de la plage. Corps parfait, à peine dissimulé par son bikini rose bonbon, bronzage idéal, la femme porte un chapeau de soleil coloré aux larges bords, grands yeux maquillés, faux ongles, bouche brillante.

Le journaliste : « Bonjour Madame, est-ce que vous aimez votre corps ? »

Madame Visuelle sursaute et s’écrie : « Ah vous m’avez fait peur !!! Je ne vous avais pas vu arriver !!! » En s’adressant à ses deux amis « On se retrouve tout à l’heure à la soirée – Séquence Émotions !!! »

Au journaliste : “Oui, c’est une soirée autour des émotions. C’est mon truc ! J’adooore ! Votre question est gé-niale !! Mais ouiiii !!!!!! J’aime, j’aime mon corps !!! Je fais mon maximum pour me sentir la plus belle possible. Le corps, c’est ce qui vous représente pas vrai ?” Son téléphone sonne : « Allô ma chérie, je te rappelle ! Je suis en interview ! À tout à l’heure, 21h pour la soirée au bar ! Ouiii !!! Tu vas rencontrer tout plein de monde, ça va être super chouette !!! Gros bisous d’amour ma chérie, ciao ciao !! »

Au journaliste : « Voyez-vous, je passe trois heures par jour dans ma salle de bain et je vais chez l’esthéticienne toutes les semaines. Il faut ce qu’il faut. Qu’est-ce que vous croyez ? En montrant ses jambes et sa taille de guêpe, on n’arrive pas à ce résultat comme ça en un battement de cils !!! ».

Puis en le regardant attentivement, elle dit au journaliste : « J’espère que vous aussi vous aimez votre corps. C’est très important de prendre soin de soi pour se sentir bien. Je peux vous donner des conseils… Moi, je voudrais que tout le monde aime son corps ! Je vais vous laisser mon numéro de téléphone vous m’appelez quand – vous – vou-lez ! »

Trois hommes passent et la saluent, elle se tourne vers eux et oublie le journaliste. Pour une première interview, celui-ci est plutôt content. Il repère un homme, genre bodybuilder au corps huilé. Allongé sur sa serviette, il semble regarder les mouches voler.

Le journaliste : « Bonjour Monsieur, est-ce que vous aimez votre corps ? »

Monsieur Musculaire : « Bah, on a le corps qu’on a. Bien obligé de l’aimer jusqu’au bout, pas le choix. Tant qu’on peut bouger ses muscles et tenir un outil, c’est ok. Voilà, c’est tout. »

Réponse courte mais efficace, se dit le journaliste… Puis il aperçoit un homme seul, portant un vieux tee-shirt difforme et un gros casque sur les oreilles. Il est maigrichon, barbe de 3 jours, jambes blanches.

Le journaliste : « Bonjour Monsieur, est ce que vous aimez votre corps ? »
Monsieur Sonore : « … »

Le journaliste, insistant : « Monsieur ? »

Monsieur Sonore, tout en posant son carnet de Sudoku et son casque : « Vous m’avez parlé ? Je ne m’entends pas penser ici, j’avais mis ma musique. »

Le journaliste : « Oui, je voudrais savoir si vous aimez votre corps ?

Monsieur Sonore : « Vous voulez dire, cette enveloppe charnelle qui permet à ma tête de se déplacer ? »

Le journaliste  « Oui si vous voulez, on peut voir ça comme ça. »

Monsieur Sonore : « … Pour moi, la question n’est pas de savoir si j’aime mon corps, c’est tout à fait secondaire. D’ailleurs, ce corps, ce n’est pas moi, je vis juste dedans, c’est très différent… Et puis quand on vit tout seul, son corps… », dit-il les yeux levés vers le ciel.

“Je cherche plutôt à comprendre comment mon corps fonctionne et pourquoi. Pourquoi avons-nous deux bras, deux jambes, d’un côté et de l’autre ? Pourquoi pas devant et derrière, pourquoi pas trois ou quatre ? Et puis pourquoi dix doigts, pourquoi pas huit ? Et pourquoi avons-nous trois articulations par membre, cela ne vous paraît pas étrange à vous ? Rien n’est dû au hasard. Nous sommes reliés à un Grand Tout, à quelque chose
qui nous dépasse… Enfin, qui dépasse les masses, moi j’ai besoin de comprendre. Mais je dois me reposer maintenant, je n’ai pas dormi de la nuit, comme d’habitude…”

Le journaliste ne s’attendait pas à une telle réponse. Il laisse donc à sa sieste le penseur au tee-shirt difforme et s’intéresse à un sauveteur en mer. Il vient de bondir hors de son jet ski dernière génération, sous l’œil admiratif des femmes aux alentours.


Le journaliste : « Bonjour Monsieur, est-ce que vous aimez votre corps ? »

Monsieur Urétral, les yeux pétillants : « Mon corps ? Si je l’aime ?! Plutôt oui ! Je n’ai aucune limite, jamais fatigué ! Je me sens comme une fusée ! Je saute de mon lit tous les matins et j’y retourne de la même façon le soir. Entre temps, j’ai une énergie de dingue, c’est que j’ai du monde à satisfaire, une tonne d’exploits à réaliser, la femme et l’orphelin à sauver ! Beaucoup de personnes comptent sur moi, à commencer par ma femme (mes
maitresses aussi mais chut… ne lui dites pas, elle est trop sensible).

Il avale en trois secondes une bouteille pleine d’eau, sous les yeux médusés du journaliste et lui lance, tel James Bond : « Allez ! Je fonce, demain ne meurt jamais ! »

Waouh se dit le journaliste, on n’a pas le temps de s’ennuyer avec un type pareil ! Puis il se tourne vers un homme radicalement opposé. Chauve, un peu grassouillet, il est confortablement assis sur son fauteuil pliable, molletonné. Rasé de près, légèrement parfumé, son tee-shirt blanc est posé à côté de lui, parfaitement plié. Il feuillette un magasine de voitures anciennes.

Le journaliste : Bonjour, aimez-vous votre corps Monsieur ? »

Monsieur Anal : « Bonjour Monsieur, vous me voyez honoré par votre question. Je suis vraiment confus de ne pouvoir vous offrir un siège. Je vais tâcher de répondre à votre question de manière complète. Vous tombez bien car je suis professeur d’anatomie.

Le journaliste se demande s’il a bien fait de l’aborder…

Oui, j’aime mon corps, mais je tiens à préciser que j’aime toutes les parties de mon corps de manière équilibrée, équitable. J’entends par là que j’aime mes 205 os, en principe nous en avons 206, mais je me suis fait retirer un os du poignet. C’était le 18 février dernier à 15h47 à l’hôpital des Peupliers, dans le 13eme arrondissement à Paris. J’aime également mes 639 muscles, même si j’avoue honteusement que j’ai une petite préférence pour mes gluteus maximus car je suis très souvent assis dessus. J’aime également mes pieds, le gauche autant que le droit, même chose pour mes mains. Mais le corps, c’est aussi toute la machinerie interne, notamment le tube digestif. Je suis vraiment désolé si je vous choque, je ne voudrais surtout pas vous importuner, mais ce n’est pas possible de faire l’impasse dessus. Vous rendez-vous compte ? Des mètres et des mètres d’intestins qui ont la lourde tâche d’évacuer nos matières fécales ! Bien sûr il faut en prendre soin, bien
sûr il faut l’aimer tout ce système. Tout est très important pour moi.

Notre corps, dans son entièreté, est notre vitrine. Moi, je n’ai pas honte de ce corps, alors oui, j’en prends bien soin. Je m’aime en fait ! Par respect pour moi, pour mes parents, pour mes ancêtres, pour tous les médecins, les savants qui ont fait avancer la science par le passé, ah le passé… C’était tellement mieux avant… Bref, eh bien eu égard à tous ces gens, j’ose penser que… »

Nous ne connaîtrons malheureusement pas la fin de son exposé car le journaliste, qui ne s’attendait pas à autant de détails, a fini par s’assoupir à moitié. Quand soudain il est sorti de son demi-sommeil par une femme qui crie sur son petit garçon. « Non ! Benjamin ! Arrêtes, tu vas casser ton jouet ! Tu sais combien ça coûte un pistolet à eau comme ça ?!»
Le journaliste remercie poliment Monsieur Anal et décide d’aller la voir. En s’approchant d’elle, il remarque des tatouages à ses chevilles fines ainsi qu’aux poignets. Elle vient d’allumer une cigarette, passe nerveusement ses doigts dans ses cheveux courts tout en surveillant son petit garçon.

Le journaliste : « Bonjour Madame, si vous avez un peu de temps à m’accorder, je voudrais savoir si vous aimez votre corps ? »

Madame Cutané, « Moi, si j’ai le temps ?! Même en vacances je cours après ce fichu temps… Vous êtes bien curieux, vous menez une enquête ? Y’a un truc à gagner si je vous répond ? Mon corps, mon corps, oui j’en prends soin, surtout de ma peau. J’ai des crèmes pour tout, regardez ! » Elle lui montre son sac, rempli de produits cosmétiques.
« Mais avec mon fils, c’est bien simple je n’ai même pas de m’occuper de mes petits orteils ! » En s’adressant à son fils : « Benjamin, ne boit pas toute la bouteille, gardes-en pour tout à l’heure ! » Au journaliste : « Cet enfant a vraiment besoin d’être cadré. Vivement la rentrée, qu’il retourne à l’école et moi au travail ! Votre enquête, c’est pour un journal féminin ? Vous donnez des échantillons ? »

Le journaliste, gêné : « Eh bien, je pourrais vous trouver ça… »

Madame Cutané : « Très bien, je suis là encore trois jours. Ici précisément car c’est le meilleur emplacement de la plage. À bientôt alors ! »

Le journaliste s’éloigne en se disant que ça ne doit pas être drôle tous les jours avec elle. Il regarde dans la direction du bar, interpellé par les rires d’un groupe rassemblé autour d’un homme. Celui-ci est en train de déguster une grosse glace trois parfums, recouverte de chocolat fondant et d’une montagne de chantilly. Le gourmand semble ne pas pouvoir choisir entre manger sa glace et parler à son public, visiblement très intéressé par ses
histoires.

Le journaliste décide de s’approcher et profite que l’homme s’essuie les doigts sur sa chemise pour lui lancer : « Avec une telle joie de vivre, j’imagine que vous aimez votre corps ?! »

Monsieur Oral, allias Cyrano : « Si j’aime mon corps moi ?! Sacrebleu, mais pourquoi croyez-vous que je me porte si bien ?! Lui lance t-il en se frappant la panse. « Si je ne l’aimais pas, mon corps, comment ferais-je pour cuisiner tous les jours dans mon restaurant étoilé ?! … Vous ne connaissez pas mon restaurant, « Les Papilles Déchaînées ?!! » Merde alors !! Il va falloir réparer ça très vite, Monsieur ! Vous êtes mon invité, tout le monde ici est témoin. Je vous donne rendez-vous ce soir, je vous réserve ma meilleure table et vous m’en direz des nouvelles !! »

À son audience : « Dites-moi mes poulets, ils sont comment mes petits plats ?!! »

En chœur, l’audience répond : « Ah, ils sont bons ! »

Monsieur Oral, le verbe haut : « Bande de vaux-riens ! Mes plats, ils sont plus que bons, ils sont succulents, pleins de passion, de couleurs, d’imagination !!!!! Je me lève tous les matins aux aurores pour dégotter les meilleurs légumes du marché, les poissons les plus frais ! »

Au journaliste : « À ce soir, Monsieur ! 19h30, rue de la Bonne Chair !! »

Monsieur Oral continue, parlant de plus en plus fort et de plus en plus emporté, tandis que le journaliste est tout content d’avoir gagné un bon repas. Quand soudain, il distingue une femme. Assise sur une serviette couleur sable, pantacourt et tee-shirt de même couleur, elle est un peu à l’écart, quasiment invisible. Surpris et intrigué, le journaliste s’approche
timidement et pose sa question quand-même.

Le journaliste : « Bonjour Madame, je même une enquête, est-ce que vous aimez votre corps ? »

La femme le regarde de travers avec ses petits yeux enfoncés, son visage ne montre aucune expression. Elle lève légèrement la tête en silence comme pour mettre son nez en avant. Pour mieux le sentir peut-être ?

Puis elle lui répond, sur un ton monocorde et mystérieux : « Je vous ai observé depuis que vous êtes arrivé sur la plage. Je suis la 8eme personne que vous interrogez… La première, c’était cette femme là bas. » Elle désigne la jolie blonde avec un mélange de mépris et de suspicion, puis elle ajoute : « Je me méfie de ce genre de personne, diamétralement opposée à moi… Trop tape à l’œil, s’il faut tout ça pour aimer son corps, non merci… Et lui là, en désignant Monsieur Anal, avec un petit rire sarcastique, très drôle. Vous n’avez rien vu venir. Si la femme hystérique ne vous avait pas réveillé, vous y seriez encore, pas vrai ? Puis elle sort un mouchoir, se mouche un bon coup et dit au journaliste : « Bonne journée Monsieur, je vous laisse à votre enquête. »

Le journaliste la quitte en se disant : « Elle est bizarre celle-là ! Elle aime son corps ou pas ? Je n’ai pas tout compris… »

Le lecteur est invité à faire ses conclusions lui-même!

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